Magdalena avait toujours détesté les supermarchés. On galère pour garer sa BMW décapotable, le chariot fait un bruit d'enfer sur le carrelage plus ou moins propre, il y a partout des gens qui ont l'air de n'être là que pour encombrer le passage. Sans compter les hordes de miséreux enragés qui vous aggressent dès que vous sortez. S'ils meurent vraiment de faim, ils ne devraient pas se torturer en se traînant devant les supermarchés. Bref, pour la jeune femme, faire les courses, c'était vraiment la corvée par excellence.
Liste en main, elle arpenta les rayons pendant une heure et demie, et, quand elle eut fini, il lui restait encore quinze à vingt minutes d'attente -au supermarché de Fairview, il n'y avait que quatre caisses. Alors qu'elle se dirigeait vers ces lieux maudits de ruine financière, d'arnaque quotidienne et d'attente interminable, Magdalena passa devant le rayon confiseries. Après tout, pourquoi pas? Elle avait grand besoin de sa tablette de chocolat blanc hebdomadaire. Elle fonça tout droit vers l'étagère où se trouvait habituellement le merveilleux produit tant convoité, et, quand elle fut devant, horreur! Pas un carré n'avait subsisté. Ne pouvant plus se contrôler, elle tournait frénétiquement la tête dans tous les sens, quand elle aperçut une gamine de Wisteria Lane avec la dernière tablette à la main. Au même instant, la petite gourde en question bouscula un homme qui, lui, tenait un sachet de nounours au chocolat! Quelle honte, pour un adulte responsable! A cet âge, on ne devrait plus se livrer à pareille débauche, tout de même! Mais bref. La jeune femme adressa un grand sourire à l'adolescente qui traînait toujours là, les bras ballants:
"Excuse-moi, pourrais-tu échanger cette tablette contre une autre? Vois-tu, mon fils est malade, et il voudrait que je lui ramène du chocolat blanc. Seulement, celle que tu tiens est la dernière, et le pauvre n'aime que celui-là..."